Un peu la tête dans la poésie? (version intégrale)

27 mars 2025
Publication - Texte intégral
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En 2024, les Éditions du Blé ont célébré un jalon marquant: 50 ans d’édition et de création littéraire. Pour souligner cet anniversaire, un cahier spécial, 50 ans en évolution, a été publié en septembre 2024 dans La Liberté. Certaines contributions ont dû être écourtées pour s’adapter au format imprimé. Ce texte est présenté ici dans sa version intégrale. Bonne lecture!

Version publiée en septembre 2024

La très petite histoire de la genèse d’un très grand livre

Lorsqu’on a «un peu la tête dans la poésie », beaucoup de choses peuvent arriver. Parfois même de très belles choses! La preuve? L’Anthologie de la poésie franco-manitobaine de Roger Léveillé publiée par les Éditions du Blé en 1990.

La question est posée au maitre d’œuvre du volume de 592 pages. L’Anthologie était un projet initié par la maison? ou un ouvrage d’auteur? En d’autres mots, où est venue l’idée de publier un livre pour lequel il n’y avait pas encore de manuscrit?

«Je pense que… », commence Roger Léveillé en pesant ses mots. «J’ai dû proposer le projet au Blé. Tu sais, ce genre de chose, c’est vague à mon souvenir. Il faudrait que je me rappelle qui était au Blé à ce moment-là. Il y avait Lionel Dorge, je parlais certainement à Lionel de ces choses-là.»

«C’est probablement moi dans le sens suivant. Quand je suis revenu au Manitoba en 1981, j’ai voulu réinscrire ma thèse de doctorat sur Robbe-Grillet que je n’avais jamais terminée. Mais on m’a dit de faire autre chose. Alors j’ai dit je vais faire une thèse sur Louis-Philippe Corbeil parce que sa poésie n’est pas connue et puis je peux avoir accès à ses manuscrits. (léger sourire) On m’a dit qu’on voulait que je voie plus large, que je me penche sur la poésie au Manitoba français.»

«Je me suis dit, ça c’est trop grand. Un peu de temps s’est écoulé et je me suis dit je ne veux pas faire une thèse, mais peut-être qu’on pourrait faire un volume. C’est à ce moment-là, à travers les Éditions du Blé, avec l’appui considérable de Rossel Vien, que le projet s’est élaboré.»

«La maison a investi des fonds pour payer la recherche. Je connaissais les auteurs contemporains, mais je n’avais pas particulièrement envie à ce moment-là de faire de la recherche dans le passé pour savoir combien de poèmes René Brun avait publiés ou pas publiés. Je le connaissais. Ou Pierre Lardon, ces gens-là. Alors, Rossel a fait ce travail-là. Et Lionel Dorge en a fait aussi.»

«Quand j’étais engagé dans le projet, j’avais toujours pensé que ce serait Rossel et moi qui signerions le volume. Il n’a jamais voulu. En lisant dans ses archives un peu je peux deviner peut-être pourquoi, quoique je ne suis pas certain. Lui voulait des notices éclectiques, moi je voulais quand même standardiser les choses. Je voulais qu’il y ait des références bibliographiques, des références critiques, ce genre de choses-là. Ce qui m’étonne, c’est qu’il n’ait pas eu ce même souci, parce que son histoire de Roberval, un livre fondamental de ce qu’on appelle la nouvelle façon d’écrire l’histoire, est très rigoureuse. Alors ça m’a surpris qu’il ne voulait pas être tout autant rigoureux.»

«C’est peut-être aussi le fait que j’avais écrit une préface qui faisait, je ne sais pas combien de pages, 60 pages ou quelque chose. Rossel a fait un travail considérable et je reconnais son apport dans la préface. C’est un peu comme ça que le projet a été lancé.»

«C’est vrai que c’est moi qui dirigeais un peu la chose… Lui il amenait ses recherches à Lionel Dorge aux Éditions du Blé, moi j’allais les chercher au Blé. On se voyait très peu souvent en face-à-face. Tout passait par les Éditions du Blé. C’est comme ça également que les maigres paiements qu’il recevait pour son travail passaient par les Éditions du Blé. Alors, c’est un truc de boite, un projet de boite qui découle du fait que j’avais un peu la tête dans la poésie.»

Le projet s’est étalé sur plusieurs années. Trente-cinq poètes, plus de deux cents poèmes, des essais critiques, de courtes biographies et, en introduction, l’histoire de la poésie francophone du Manitoba du début du xixe siècle jusqu’aux années 1990. Un outil de référence par excellence, un livre incontournable sur l’histoire littéraire du Manitoba français. Il fallait le faire, comme on dit!

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